Manon Orsi a passé un baccalauréat en littérature puis a réalisé une année de mise à niveau en langue russe. Elle a ensuite passé son DNA (Diplôme national d’art) à l’École supérieure d’art et de design de Valence, dans le département de la Drôme, avant de rejoindre l’EESAB de Lorient en 2022.

Le travail de Manon s’inscrit dans le domaine du documentaire. En plus de son travail de vidéo, elle a envie de développer sa pratique de la photo et du son. Son territoire se définit notamment à travers des entretiens et des discussions avec les seniors en situation de précarité, dont beaucoup sont marginalisés par la société. Pour Manon, la forme documentaire est un moyen de donner la parole à ces personnes. C’est un outil de dévoilement de l’humanité, à destination d’un public sensible aux questions de marge et de normes. Elle aimerait que son travail ait une réelle portée sociale.
La transmission de souvenirs, d’anecdotes, lui permet de comprendre le rapport d’un individu à l’autre, c’est-à-dire les relations que ces personnes peuvent entretenir avec leurs parents, leurs enfants, et le reste de leur entourage. Elle crée des liens avec ces personnes grâce à ses entretiens et cherche à briser la frontière entre elle et le sujet afin de permettre un changement de regard du public sur ces individus.

Les sources d’influence de Manon sont multiples : De Jean Eustache à Alice Diop, en passant par Rithy Panh, Anri Sala et Ulrich Seidl.
La découverte du travail d’Alice Diop, au moment de la sortie du film Nous (2020), a été pour elle une révélation. La réalisatrice devient alors une référence importante pour Manon qui se forme au montage. Elle évoque aussi le travail de Jean Eustache, Numéro Zéro (1971), présentant sa relation avec sa grand-mère, celui de Rithy Panh, particulièrement son documentaire L’image manquante (2013), évocation par un travail de modelage de figurines mises en scène, de la terreur et de l’horreur vécues par les Cambodgiens durant le régime khmers rouge dans les années 1970. L’intervista (1998) d’Anri Sala aborde des thématiques de guerres, mais fait aussi le récit de sa mère durant sa jeunesse albanaise. Manon s’intéresse également à l’œuvre du réalisateur autrichien Ulrich Seidl, notamment à son approche esthétique des plans et à la qualité de son image.
Elle apprécie beaucoup le travail de Mariana Otero, en particulier son film À ciel ouvert (2013) sur des enfants atteints de troubles psychiques. Elle a rencontré la documentariste en janvier 2022 à l’occasion d’un entretien. Le travail de l’artiste visuelle Eija-Liisa Ahtila l’a inspirée pour la réalisation d’une installation visuelle, présentée sous la forme d’un diptyque, dans laquelle elle raconte l’histoire d’une rencontre.

Toutes ces références nourrissent son approche et l’aident à formuler des questionnements plus précis tant sur le fond de ses sujets que sur la forme documentaire. Cela lui a également permis d’élargir son point de vue critique sur le documentaire et de repenser sa compréhension. En regardant les travaux des autres, l’idée de briser la frontière entre le vidéaste et le sujet est devenue évidente et nécessaire pour Manon. Plutôt que de se dissimuler derrière la caméra, elle veut se montrer dans le quotidien de son sujet, à ses côtés, dans son intimité.

Une autre piste explorée par Manon dans ses recherches est d’envisager des dispositifs complexes pour ses documentaires, en utilisant plusieurs écrans et vidéo-projecteurs pour les développer en formes diptyques ou triptyques. C’est pour elle une manière de mettre en place une relation.